Masculin Pluriel
le Mythe de la Virilité
Voici un post pour vous les hommes (et pour vous les femmes)(hahahah). Ça fait plusieurs fois que l’on me parle de ce livre « le mythe de la virilité ». je trouvai le nom même insultant pour les hommes, ce qui me heurtait au plus haut point, jusqu’à ce que j’écoute son auteure, la philosophe Olivia Gazalé, exposer ses recherches sur France Inter.
et me voilà conquise!
Donc voilà le mal du mâle, aujourd’hui et des milliers d’années, est de confondre masculinité et virilité. Comme il y a des singularités, des féminités, il y a aussi des masculinités. La virilité n’en est qu’une. Et en plus, c’est pas franchement la plus jolie.
L’idée même du « vir » est d’être le suc de l’humanité (les meuffes, vous servez à rien). Pire, il se définit comme anti-féminin : Le corps de la femme se répand (il saigne etc), celui de l’homme doit se contrôler. Le fondement même de la virilité est donc misogyne, et la construction qui s’en suit est forcément violente. Alors il y a des choses que j’aime comme le sens de l’honneur, de la droiture (ça manque un peu aujourd’hui non ?), etc… mais ce qu’on a oublié entre temps c’est que la virilité est une construction, et non une nature. Et puis surtout entre temps, la virilité a trouvé un outil de mesure : le phallus ; pas de zizi levé (de grosse bagnole, de fric, de grande tour) pas d’homme. Les chrétiens sont même aller définir la panne sexuelle (on parle même pas d’impuissance) comme une malédiction divine.
Ainsi la violence faite aux hommes est de sans cesse leur faire planer la possibilité de ne pas en être.
Nous les femmes, on souffre de pas mal de choses mais pas de ça. Jamais entre nous, on se dit « nan mais sois une femme quoi » sous entendu, t’en es peut être pas une. On comprend alors la fragilité extrême de l’homme vis à vi de sa masculinité (confondue donc à la virilité).
the department of Masculinity, tiré du livre « The Descent of Man » de Grayson Perry (post ici)
En écoutant une autre émission sur France Cu la faisant intervenir, je me sens cela dit frustrée car la journaliste la chahute, à raison, sur : non mais vous n’allez pas plaindre les hommes alors nous les femmes souffrons beaucoup plus qu’eux. Et l’auteure de ne pas vraiment répondre.
Si je puis me permettre, on pourrait avancer cette idée, développée par Grayson Perry : il y a la temporalité, et ensuite l’intensité/gravité. Disons que temporellement dans la vie d’un petit garçon, d’un futur homme, il y a violence inouïe en premier lieu, dans l’injonction permanente à l’œil sec, à la réussite, à l’invulnérabilité, à la performance. A part mon mec et Shivam (Trudeau et Obama), et aussi sensible soit il, je ne connais aujourd’hui aucun homme capable de pleurer. ça fait pas beaucoup. nan mais les mecs si vous saviez comme c’est génial de chialer…
pour résumé les hommes sont les premières victimes de cette société virile dans la temporalité de leur existence, et les femmes les premières victimes dans l’intensité des violences qui leur sont faites. Car c’est bien elles qui vont pâtir bien plus violemment encore, des prédateurs mais aussi de la société qui dans son entièreté est misogyne.
en même temps, en miroir, bien qu’on ne puisse pas dire de la société qu’elle soit misandre, elle n’aime pas beaucoup les hommes non plus. Seuls les virils ont une place. les autres doivent se conformer à cet « idéal »… qui a montré ses limites!
Ainsi, si nous faisons grandir nos garçons sans leur faire cette violence, si nous développons le féminisme dans cette idée d’accueil des singularités, et la fin des injonctions, les hommes pourront être plus épanouis et heureux car réconciliés dans leurs masculinités et donc plus forts (et donc pas violent), plus aimants, moins dominants, plus singuliers, pour vivre auprès de nous femmes, qui avons déjà enclenché cette réflexion de fond sur « c’est quoi être une femme ».
Les mecs, mettez-vous y. déconstruisez tout ce que vous savez et faîtes votre aggiornamento ! Comme un ami me le disait « la question n’est pas d’être un homme, un vrai, mais de devenir un homme véritable. » wahou !
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22 commentaire(s)
Tellement, tellement, tellement…!
C’est terrible qu’on puisse mettre en concurrence la violence faite aux femmes et la violence faite aux hommes (très réelle à mon avis aussi…), cette injonction énorme de taire leurs émotions, ce qui a force fait de beaucoup d’entre eux des analphabètes d’eux-mêmes, qui du coup n’ont plus que la brutalité pour s’exprimer. Quand on subit une violence dans l’exprimer on a de grandes chances de la propager. C’est bien ce dialogue qui émerge enfin sur la masculinité ET sur la violence faite aux femmes : on guérit les victimes mais on s’intéresse AUSSI aux causes. Penser qu’il faut choisir me paraît très bizarre. Tellement d’espoir dans cette parole masculine qui s’ouvre ! Ça va être beau, faut pas lâcher l’affaire !
oui! merci Chiara! je prépare une vidéo là dessus avec Jerry qui est psy, mais aussi travaille avec des groupes d’hommes depuis 25 ans. tellement intéressant! et plein d’espoir! bise
Pour rebondir sur le sujet, je me permets de te conseiller d’écouter cette musique de mon ami Eddy, qui en dit long (et beau !), sur la difficulté des carcans de masculinité qu’on impose aux hommes dans la société actuelle : https://www.youtube.com/watch?v=XfbM3LD0D9Q
Tout est beau, l’image, le texte, la voix, c’est une merveille et c’est surotut fort comme message !
Merci Mai, pour ça et pour le reste, très belle journée à toi !
Mon mec aussi il pleure!! Super texte Mai, tellement d’accord, et je me sens si optimiste depuis que le débat est ouvert en grand ces derniers mois! Il semble de plus en plus clair que nous ne parlons pas de la condition des femmes uniquement, mais d’un immense changement de paradigme social H & F. Go go go!!
yes! il a de la chance et toi aussi! c’est une “qualité” (compétence?!!!) si rare et qui sauve de tellement de blessures et de violence. allez compassion! ❤️
Bonjour Mai ! Merci encore pour tous ces articles, leur profondeur et leur sensibilité.
Il y a juste quelque chose que je n’ai pas bien compris : quand tu dis que les femmes ne se disent jamais entre elles, « allez, sois une femme » en sous-entendant qu’on pourrait n’en être pas une… Comment tu articules ça avec l’injonction à la féminité, du style « sois féminine » ou bien « c’est un vrai garçon manqué » ? J’ai l’impression qu’on est aussi enfermée dans un statut duquel on pourrait déchoir, même si ce ne sont pas les mêmes critères… Tu peux m’éclairer ?
Merci beaucoup 🙂
merci pour ton com sabrina. entre nous entre meuffes, qu’on soit lesbiennes, strait, plutôt “féminine” plutôt “masculine” on ne se dit pas entre nous “allez sois une femme quoi”. on “est” femme et puis c’est tout. au delà de toutes nos singularites. après il y a mille (un milliard) de messages toxiques sur la féminité ou le fait de “oh super elle garçon manqué (rien que l’expression en dit long)/ je suis inquiet.e mon fils aime le rose”. mais en vérité, pour moi par ex qui tente de sortir de ce système, personne n’est jamais venu me dire “nan mais t’es pas une femme, une vraie”. est ce plus éclairé de ton côté? mille mille bises sabrina. à vite!
Les hommes qui ne pleurent pas sont remplis de larmes. Charlie Chaplin
Le lâcher prise à travers le pardon et les larmes permettent d’éviter de perpétuer en soi et chez les autres le mal subi, d’éviter également de rester accroché au passé et de vivre dans un ressentiment constant.
Extraits de l’éloge des larmes d’Anne Lécu :
Qu’œil et l’arme soient un (…) Quand les yeux pleurent, les larmes voient. Andrew Marvell
« Si le monde nous échappe par excès de souffrance, on peut aussi le manquer par avarice de larmes. » Chantal Thomas
Mots de fleurs, larmes
Frissonnant entre les cils
Comme de minuscules soleils !
Athanase Vantchev de Thracy
Pour ma part je ne me suis pas construit avec ce mythe. Aucune fanfaronnade en écrivant cela.
L’éducation de ma mère, sans doute. Les jouets représentant des armes ne rentraient pas dans la maison, par exemple. J’ai d’autres tares mais pas celle là. 😉
yes! hier comme par hasard, j’assiste à la projection de 4 sieurs de lanzmann. il faut son discours sur son cœur qui ne cesse de pleurer. sur le fait que les larmes ne le sépare pas mais l’un it à l’autre, au delà du jugement. ❤️
https://www.lci.fr/tele/arretons-de-nous-juger-les-unes-les-autres-les-mots-tres-forts-de-maiwenn-dans-stupefiant-france-2-lea-salame-2076622.htm
rien à voir avec ton article…quoique.
Je lis tes post Mai et pourtant je n arrive pas à commenter parce que…ben je ne trouve pas les mots juste.
Et puis ce soir je suis tombée sur cette vidéo.
Il y a quelques jours j ai dit à mon homme « nan mais là il se passe un truc fort un truc de dingue…l histoire est en train de changer…c est comme pour le droit à l avortement le droit à la.contraception…les femmes bougent mais ca.se.passe autrement c.est tout. Et je pense sincèrement que la peur nous fait parfois agir à l inverse de ce que l on souhaitrait.
Personnellement ça fait.plus.d un an que.je suis choquée de tout ce qui se passe…depuis l élection de Trump.
Je suis tres contente d entendre Maiwen parce que j aime beaucoup cette femme et que les mots qu elle dit sont ce que je pense…ce que j ai.envie.de. dire.
Maintenant je dirais « ECOUTONS NOUS » et je suis certaine qu on y arrivera
Mille bises Mai et merci mais merci mille fois de nous donner toute cette place pour ces reflexions❤❤
oh le lien ne marche pas. mais oui tu as raison nous sommes au cœur de l’Histoire. allons y!
ça y est j’ai vu. j’aime beaucoup. merci.
❤
Hasard qui fait bien les choses, j’ai écouté une intervention d’Olivia Gazalé dans le fabuleux podcast « les couilles sur la table » pas plus tard que ce week end, et ce qu’elle dit de l’éducation virile notamment dans la Grèce et la Rome antiques (et de leur misogynie) est tout bonnement passionnant, et tout d’un coup, tout fait sens pour moi avec vos réflexions, ce que j’écoute, et notamment le billet sur le fait que #metoo n’est pas un projet de société.
Je ne crois pas à la concurrence des souffrances : je pense que l’on vit dans un système, qui à beaucoup de titres, fait souffrir hommes ET femmes (et non-binaires aussi) à beaucoup de titres, par le biais d’injonctions permanentes et de violences faites aux hommes ET aux femmes. Je ne pense en effet pas que mettre ces souffrances en concurrence changera la donne : reconnaître que les hommes AUSSI souffrent de ce modèle de société, ce n’est pas dire que les femmes ne souffrent pas (et elles restent les principales victimes de ce système, on est parfaitement d’accord, ne serait-ce que par le nombre de victimes de ces violences). Pour autant, oui, les garçons sont élevés dans une violence incroyable aussi et c’est ça qui est intéressant. Le défi maintenant, ce sera de pouvoir trouver un projet suffisamment fédérateur pour tout le monde, pour montrer aux uns et aux autres que des femmes fortes ne feront pas des hommes des « faibles », mais que tout le monde peut être fort ensemble, et que la force, c’est aussi reconnaître quand on ne l’est pas, savoir apporter de l’empathie dans ses relations et qu’on pourrait en bénéficier pour lutter contre toutes les discriminations de notre société, parce qu’elle envisage les rapports avant tout dans des rapports de domination.
Désolée mon commentaire est décousu, mais merci beaucoup pour toutes ces réflexions.
colombe au contraire! c’est très clair. ce projet de compassion est un projet inclusif. un projet difficile mais dont je rêve tellement que je vais y mettre tout ce que je peux donner. allons y! bises à toi!
AHHHHH merci Mai d’éclairer encore ce débat!
là je vais partager ton article sur le groupe FB de la chorale féministe où je chante car le sujet (j’avais partagé l’émission de France culture) avait fait réagir mes choeurettes 🙂 grosses bises!
top, tu nous dis comment ca s’est passé? merci!
Hier, j’ai vu mon bébé de 2 mois sourire en entendant la chanson de Matthieu Chedid « ni être un homme, ni être une femme, mais une âme » !
Si, si, il a souri, JE LE JURE !!!
😉
HIHIHI yes!
Je crois que malheureusement il y a des femmes qui entendent aussi ce genre de phrase « tu n’es pas une vraie femme » , notamment quand elles font le choix de ne pas avoir d’enfants. C’est très violent aussi comme remarque.
oui tu as tout a fait raison. ça n’est pas une norme entre femmes, contrairement aux hommes pour qui cette suspicion est une norme. mais oui ça arrive pour certaines femmes notamment dans ce cas là. merci pour ta participation à notre cheminement . ❤️
Je réagis tardivement à cet article mais je me retrouve dans ce que dit Sacha. J’ai 38 ans, pas d’enfant.
J’ai entendu cette phrase très très (trop) souvent depuis mes 30 ans (« Tu ne peux pas vraiment être une femme tant que tu n’as pas donné la vie ». OK merci).
Méchanceté consciente ou pas ? La plupart du temps, ce genre de douceur est balancée par des gens qui te connaissent très peu, souvent au boulot quand on te demande ton âge. Vient alors la fameuse question « Et t’as des enfants alors ? » « Non. » S’ensuit alors cette phrase assassine ou un silence gêné ou même une demande de justification pour tenter de comprendre quelle est cette hérésie de ne pas avoir d’enfant.
Je t’ai découverte via cet épisode de La Poudre avec Mona Chollet qui m’a littéralement bouleversée. Elles y parlent d’énormément de choses mais en partie de ces femmes qui vivent en dehors des normes que la société impose. Il y a encore quelques années, je ressentais de la culpabilité, je me remettais en question pensant que j’étais un être immature et je me demandais ce qui ne tournait pas rond chez moi. Aujourd’hui, je suis beaucoup apaisée et je n’accorde plus aucune importance à ces jugements. Car c’est juste ça finalement : tu représentes une gêne par rapport au fait que tu ne suis pas cette norme. Rien de plus qu’un décalage qui met certaines personnes mal à l’aise (plus que toi-même au final).
Mai, tout ton travail sur le masculin/féminin et rapport à soi/ à l’autre résonne très fortement en moi en ces temps compliqués de ma vie où je réfléchis, je me remets en question, je déconstruis beaucoup et je parviens à me libérer de beaucoup de choses. Je ne réagis pas forcément à tout ce que je lis même si ce n’est pas l’envie qui manque. Mais je voulais juste te dire merci de m’aider à avancer sur mon chemin <3 <3 <3